Frequently asked questions
La République en Chute : le leadership dans une société anxieuse

Vers une régénération d’une culture radicalement aliénée
Ce que la France traverse aujourd’hui n’est pas seulement une crise politique. C’est un épuisement systémique du sens, un burnout civilisationnel.
Comme le propose Vanessa Machado de Oliveira dans Hospicing Modernity, nous devons accompagner la modernité cartésienne dans sa fin. Non pour la sauver, mais pour l’aider à mourir dignement.
1. Une société malade - au sens médical, moral et métabolique
Les symptômes sont multiples et mesurables :
- La France demeure le premier consommateur mondial de psychotropes, selon l’OCDE (près de 13 % de la population adulte sous anxiolytiques ou antidépresseurs).
- Plus de 12 millions de personnes souffrent de maladies chroniques (DREES, 2024).
- Selon Santé publique France, un tiers des jeunes déclarent des troubles anxieux ou dépressifs.
- Le pays reste le plus centralisé d’Europe, renforçant la fracture territoriale et la perte de confiance politique (Cevipof, 2023).
Ces chiffres ne sont pas que des données : ils racontent un corps collectif malade, un organisme social qui a oublié comment respirer avec la Terre.
2. Le tabou du leadership
En France, leadership est un mot suspect. On le confond avec l'autoritarisme ou ego. Si le Président de la Réublique agit comme monarque, c'est que la relation avec les leaders n'a pas évolué suffisament.
Pourtant, l’absence de leadership -c’est-à-dire de présence incarnée, de responsabilité partagée et d’écoute systémique - crée un vide que remplissent le cynisme et les extrêmes.
Les institutions (ENA, Sciences Po) forment des esprits brillants mais peu entraînés à l'intelligence émotionnelle et la maturité relationnelle.
3. Une communication qui soigne plutôt qu’elle ne séduit
L’article sur la communication régénérative l’avait bien posé : notre langage politique est malade. Il s’adresse aux électeurs comme à des marchés de consommateurs.
La communication régénérative, au contraire, écoute avant de convaincre. Elle cultive la résonance, pas la persuasion. Communiquer, c’est co-tisser le réel plutôt que le vendre.
4. Les ombres de la République
Hospicer la modernité française, c’est reconnaître l’épuisement du récit républicain - ce mythe universaliste qui masque des siècles de colonialisme, de séparabilité et de déni.
L'ouvrage Outgrowing Modernity nous invite à ne plus fuir ce déclin mais à le composter : à transformer la honte historique en humus de discernement et de compassion.
5. Vers un leadership régénératif
Le leadership régénératif, tel que formulé par Giles Hutchins et Laura Storm, propose de quitter la logique mécanique de la performance pour s’inspirer du “Logic of Life” - les principes d’interdépendance, de diversité, de cycles et de vitalité propres aux systèmes vivants. Ce leadership ne vise pas la croissance continue mais la régénération du vivant : il cherche à restaurer les conditions de la vie, dans les organisations comme dans les sociétés. Il part du constat que nos structures actuelles - politiques, économiques, éducatives - épuisent plus qu’elles ne nourrissent. En France, cela exige un renversement culturel : passer du contrôle à la coopération, du récit héroïque à la responsabilité partagée.
Ce type de leadership agit sur trois plans simultanément : l’être, la culture et le design. Il demande d’abord un travail intérieur -humilité, écoute, conscience des interdépendances - pour ensuite nourrir une culture collective fondée sur la confiance, la diversité et la créativité, et enfin redessiner les institutions pour qu’elles fonctionnent comme des écosystèmes vivants : adaptatifs, reliés et nourriciers.
Appliqué à la crise française, le leadership régénératif invite à une transformation de la gouvernance elle-même. Il s’agit moins de diriger que de cultiver les conditions du vivant collectif, de reconnaître les saisons de la société - repos, mutation, renouveau - et de remettre le soin, l’écoute et la vitalité au cœur du politique. Un leadership vivant, donc, enraciné dans la Terre et dans la relation, capable de répondre à la complexité non par la domination, mais par la métabolisation et la régénération.
Mort à la France, Vive la France
Peut-être faut-il laisser mourir la France telle que nous la connaissions - non pour la détruire, mais pour accompagner sa mue.
Ce n’est pas un cri nihiliste : c’est un acte de soin.